Abolition de l’esclavage «sophistiqué» au Mali : les chercheurs appellent à l’union

Les sociologues et anthropologues de l’Académie malienne des sciences étaient, samedi 05 novembre 2022, à la direction générale de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, dans le cadre d’un débat autour de la thématique « Les systèmes de domination par ascendance au Mali (y compris « l’esclavage par ascendance ». Ils ont tiré la sonnette d’alarme sur le phénomène d’esclavage au nord du Mali.

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L’esclavage n’a-t-elle pas été abolie au Mali en 1905 ? C’est la question que vous vous posez sûrement. En effet, si l’esclavage a été abolie dans plusieurs régions de l’Afrique, ce n’est vraisemblablement pas le cas concernant le Mali. Il existe toujours une forme d’esclavage se présentant sous un aspect plus élégant : la domination par ascendance.

Ce sujet était au cœur des débats animés par trois conférenciers, à savoir, le Professeur Bakary Camara de l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako (USJPB), le Docteur Boureima Touré de l’Université des lettres et des sciences humaines (ULSHB) et Mohamed Ag Bilal, représentant de l’association Temedt au Mali.

Selon les conférenciers, l’esclavage par ascendance ou l’esclavage héréditaire désigne « un groupe de populations ou d’individus considéré comme asservi depuis la naissance ». Et ce statut « d’esclave » se transmet de mère en fils(filles), quel que soit le statut du père.

Au Mali, les enfants des femmes esclaves appartiennent à la famille de leur « maître » et n’ont aucun droit d’héritage.

Comment les femmes acquièrent-elles le statut d’esclave ?

Dr Boureima Touré affirme qu’« à l’époque précoloniale, des individus ont été capturés au cours du razzias ou échangés par des guerriers lors de conflits tribaux. C’est en ce moment qu’ils ont acquis le statut d’esclave. Les descendants de ces esclaves apprennent la langue de leurs maîtres et adoptent leurs cultures. Ils vivent dans des conditions de grande précarité et sont soumis aux mariages forcés, aux mauvais traitements, aux travaux forcés et sont privés de liberté. Les jeunes filles sont affectées aux travaux domestiques, victimes d’abus depuis leur jeune âge et donné en mariage à un « esclave » afin que leurs enfants deviennent la propriété du « maître ».

Les principales activités de ces « esclaves » sont l’agriculture, l’élevage et le servage.

Aux dires des conférenciers, l’on rencontre l’esclavage par ascendance essentiellement au nord du Mali dans la région de Kayes, à Segou et moindrement à Sikasso.

Que faire?

« L’esclavage constituait l’un des principaux piliers de l’économie au Soudan (Sénégal, Mali, Côte d’Ivoire, Guinée…), il a été aboli officiellement aboli 1905 par les Français. Malheureusement après l’indépendance le phénomène a persisté dans plusieurs régions du Mali. L’ex-président Modibo Kéita a essayé de l’éradiquer mais après le coup d’état de 1968, ses actions ont été interrompues », se souvient professeur Bakary Camara.

Selon Mohamed Ag Bilal, la seule option pour éradiquer définitivement l’esclavage au Mali est l’unité.

« Nous devons nous unir afin de former une bombe que nous allons lâcher sur ce phénomène » a t-il souhaité.

Christophe Gouéssé (Stagiaire)

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