IRD: 35 ans d’accord de recherche pour le développement du Mali 

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Laurent Vidal est chercheur en Anthropologie. Il a occupé des fonctions de direction, à la fois au siège de l’Institut de Recherche pour le Développement en France à Marseille et pendant quatre ans, la fonction de représentant de l’IRD au Sénégal. Désormais Représentant de l’IRD au Mali, le chercheur raconte à JSTM, dans une interview, la mission et la vision de l’institut qu’il dirige depuis le début de l’année 2019. (Retrouvez l’intégralité de cette interview sur notre chaîne YouTube, JSTM TV).

Quel rôle joue votre institution au Mali et depuis quand a-t-elle débuté ses activités ?

Nous sommes un organisme de recherche public français. On a pour principe de travailler en partenariat avec les institutions de recherche du pays qui nous accueille. C’est-à-dire, les universités et les centres de recherche. On est très pluridisciplinaire, très multithématique et nous sommes au Mali depuis 1950. Avant on s’appelait l’Orstom (Office de la recherche scientifique et technique outre-mer). Quand je dis que nous sommes au Mali depuis les années 50, à ce moment-là, la présence des chercheurs de l’Orstom n’était pas formalisée. Notre présence a été formalisée par un accord avec les autorités maliennes en 1984. Mais on était là bien avant, notamment pour des recherches sur le fleuve Niger. Alors je dirai 35 ans de présence officielle.

Combien de chercheurs collaborent avec l’IRD-Mali et quels sont les profils que vous recherchez ou privilégiez au sein de votre institution ? 

En fait, il y a plusieurs façons de travailler au Mali pour les chercheurs de l’IRD. Il y a des chercheurs qui sont présents ici. Parce qu’à l’IRD qui est un organisme de recherche public, on a cette particularité de pourvoir envoyer nos chercheurs dans les pays pendant plusieurs années, 2, 3 ou 4 ans. Les chercheurs qui sont dans cette situation ne sont pas très nombreux au Mali  : nous sommes six (06) y compris moi. Nous sommes de profils variés. Il y a deux anthropologues, un nutritionniste, une géographe et un économiste. Cette représentation accueille toute une équipe administrative d’une douzaine de personnes pour faire fonctionner nos recherches et partenariats. Mais pour des programmes de recherches menées au Mali, on a des chercheurs qui nous viennent d’autres pays, notamment de France, sur des missions de courte ou longue durée. Ceux qu’on appelle des chercheurs dans notre langage. Ce sont des gens qu’on a recruté à partir d’un concours au niveau doctorat. À côté de ça, on a d’autres qu’on peut qualifier de chercheurs : des gens qui ont le doctorat, mais qui n’ont pas encore été intégrés.

Une bonne recherche appliquée c’est une recherche qui est d’abord très forte sur le plan fondamental | Dr Laurent Vidal, Directeur IRD-Mali

L’Agriculture, la santé et l’environnement sont presque les domaines de prédilection de recherche dans notre pays. Quels sont les projets de recherche conduits par l’IRD actuellement ?

Ce qu’il faut que je précise est que nos recherches visent à produire des connaissances nouvelles et s’attaquent aussi à des questions qui préoccupent le pays. C’est de la recherche fondamentale et appliquée. Car pour nous une bonne recherche appliquée c’est une recherche qui est d’abord très forte sur le plan fondamental. Dans le domaine de la santé, on est très impliqués dans la recherche sur le paludisme en collaboration avec le laboratoire de feu le professeur Ogobara Doumbo, le MRTC avec lequel on collabore depuis un certain moment. On a aussi un ensemble de recherches sur le VIH. On travaille aussi sur la question de la couverture médicale universelle et depuis peu, on a des collègues qui travaillent sur le fonctionnement du système hospitalier du Mali. L’IRD a tout un ensemble de recherche sur les questions de nutrition, de sécurité alimentaire, d’insécurité alimentaire dans le centre et le nord du Mali. Dans ce registre-là, nous avons un projet de recherche financé par l’ambassade de France au Mali, où il s’agit de voir, dans la ville de Bamako, où est cultivé ce que l’on mange tous les jours, comment sont approvisionnés les marchés, qu’est ce que les gens consomment et quel est l’impact sur la santé. Nous faisons également des recherches en sciences sociales sur les dynamiques de la société malienne, que ça soit sur des questions foncières, de gouvernance ou de religion.

Parlez-nous des exploits que vous avez réalisés au Mali, et comment sont-ils utilisés par la population ?

Exploit, c’est peut-être un bien grand mot. Nous, on essaie de faire des recherches qui correspondent à des besoins. Mais la difficulté est de faire passer nos résultats au niveau des décideurs politiques. Et ça, c’est un processus très complexe. Je parlerai du projet du risque d’inondation à Bamako à travers lequel, des collègues ont constaté que, quand il y a une pluie cela modifie le signal entre deux bornes téléphoniques. Donc à partir de là, on sait quelle quantité d’eau va tomber et à quel endroit. Si en plus de ça, vous avez des cartes du risque d’inondation de Bamako, vous pouvez prévoir les inondations dans la ville. On a un système d’alerte que nous pouvons mettre au service des autorités afin de leur permettre de déclencher le secours qu’il faut. Nous avons plusieurs exemples de projets de ce genre qui sont sur papier. Mais pour que ça soit utile pour la population, il faut que les décideurs se l’approprient et cela ne dépend pas de nous.

Partagez-nous votre vision pour les années à venir ?

La vision de l’IRD-Mali est de travailler premièrement sur la thématique Une seule santé. C’est-à-dire, à la fois pour la santé humaine, la santé animale et la santé des plantes. Aujourd’hui, on le voit bien avec l’épidémie de coronavirus, une maladie d’origine animale qui est passée chez l’homme. Il y a beaucoup de pathogènes qui circulent dans notre environnement. Donc nous allons mettre des moyens et nous en avons déjà pour mener les recherches. Le deuxième grand axe est les questions de société. En même temps, je rappelle aussi que nous sommes ouverts à toute proposition de projet de recherche de nos collègues chercheurs maliens.

 

Propos recueillis par Mardochée BOLI et Mariam Aldiou

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